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Photo du rédacteurPARLEMENT DE WALLONIE

LA PRÉVENTION EN MATIÈRE DE CANCER


QUESTION ORALE DE MME LAFFUT À MME MORREALE, MINISTRE DE L’EMPLOI, DE LA FORMATION, DE LA SANTÉ, DE L’ACTION SOCIALE ET DE L’ÉCONOMIE SOCIALE, DE L’ÉGALITÉ DES CHANCES ET DES DROITS DES FEMMES, SUR « LA PRÉVENTION EN MATIÈRE DE CANCER »


M. le Président. – L’ordre du jour appelle la question orale de Mme Laffut à Mme Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale et de l’Économie sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes, sur « la prévention en matière de cancer ». La parole est à Mme Laffut pour poser sa question.


Mme Laffut (MR). – Madame la Ministre, une récente étude de Philippe Defeyt, portant sur le nombre de cancers diagnostiqués en Belgique, apporte des éclairages particulièrement intéressants sur l’évolution de cette pathologie protéiforme au cours des deux dernières décennies. La normalisation des données, permettant de comparer deux périodes entre elles, toutes choses étant égales par ailleurs, indique que, par exemple, entre le début des années 2000 et aujourd’hui, l’incidence du cancer du sein ne bouge pas, et ce, malgré les nombreuses campagnes de prévention initiées sur la période. Le cancer de la peau augmente quant à lui de quelque 130 %, et ce, de manière égale chez l’homme et chez la femme. Le cancer du poumon bondit de 86 % chez les femmes, mais diminue de 20 % chez les hommes, alertés depuis plus longtemps par les dangers du tabagisme. Le cancer de la prostate, le principal cancer chez l’homme, est en recul de 16 %, tandis que celui du pancréas fait un bond de 50 %. Êtes-vous officiellement informée de ces données ? Y a-t-il moyen de tirer parti de toutes ces statistiques ? Si oui, de quelle manière ?


M. le Président. – La parole est à Mme la Ministre Morreale.


Mme Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale et de l’Économie sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes. – Madame la Députée, le risque de cancer peut diminuer en investissant dans des politiques de promotion et de prévention de la santé. Je crois que les gens n’en ont pas suffisamment conscience. En effet, 30 à 50 % des cancers – ce qui est énorme – peuvent être évités par un travail sur les déterminants de la santé. C’est pourquoi, en Wallonie, nous nous sommes munis d’une programmation qui fixe les priorités en prévention et en promotion de la santé afin d’optimiser les ressources pour atteindre ces objectifs communs. L’un des axes de cet outil se concentre sur la prévention des maladies chroniques, dont font partie les actions relatives à la prévention des cancers. Au-delà, et face aux chiffres dont nous disposons via le Registre du cancer en Wallonie, il faut avoir une vision globale et s’attaquer aux facteurs de risque. Il est vrai que le dépistage permet de réduire la mortalité liée par un diagnostic précoce et qu’il augmente les chances de guérison. C’est pour cette raison que les autres axes de la programmation ciblent la promotion en amont. Je suis allée, il y a quelques jours, à la clinique du sein du CHR de Liège. Les sénologues m’ont expliqué qu’il y avait parfois un biais dans les campagnes de dépistage parce que des femmes estiment que, en allant se faire dépister et en voyant qu’elles n’avaient pas de cancer, elles pouvaient continuer à vivre en ne prenant pas garde à leur alimentation et à leur sédentarité. Or, à chaque fois que je teste cela auprès de la population, elle n’en a pas conscience. On estime, grosso modo, que 40 % des cancers peuvent être évités grâce à cela. Il faut travailler à la base sur la promotion de l’activité physique, l’alimentation, la lutte contre la sédentarité et la prévention des addictions, puisque l’alcool et le tabac sont des causes majeures qui conduisent à une prévalence plus importante des cancers. Il y a tout un travail en amont sur ces facteurs qui doit être mené et qui s’est structuré depuis le début de cette année via la programmation wallonne. Vous faites part de certaines disparités entre les hommes et les femmes dans la prévalence des cancers. Les inégalités de genre et les inégalités sociales en santé font aussi partie intégrante des préoccupations. On les a d’ailleurs inscrites dans la programmation comme des objectifs transversaux à tous les axes. Le comité de pilotage de ce plan WAPPS s’est réuni deux fois sur ce sujet et s’attelle à définir une méthodologie pour monitorer les actions mises en place pour atteindre les objectifs fixés. Cette méthodologie sera notamment fixée par le groupe de travail créé qui réunit les centres locaux de la prévention de la santé, les centres d’expertise. L’évaluation, quant à elle, commencera par la construction d’une cartographie qui reprend les actions de promotion et de prévention de la santé en Wallonie. Cet outil va permettre de visualiser tant la couverture santé des actions entreprises, mais aussi la couverture territoriale, les publics, les objectifs transversaux, et cetera. Une fois que cet outil sera créé et que la méthodologie sera définie, nous serons en mesure de revenir avec un état des lieux et des actions réalisées dans le cadre de cette programmation. Une présentation du nouveau paysage de la promotion de la santé et de la prévention est aussi prévue au Parlement début de l’année 2024. Comme vous l’avez compris, les programmes de dépistage font aussi partie de nos travaux actuels. Un arrêté relatif au programme de médecine préventive de lutte contre les cancers va être prochainement présenté en deuxième lecture au Gouvernement. Trois appels à agréments vont être lancés pour désigner les centres d’opérationnalisation en médecine préventive en charge de chacun des programmes de dépistage organisé, c’està-dire le cancer colorectal, le cancer du sein et du col de l’utérus. Quand ces centres seront agréés, les protocoles de mise en œuvre des programmes seront rédigés, comme c’est écrit dans le Code wallon de l’action sociale. Ces protocoles vont détailler davantage les procédures, les publics ciblés, les flux de données, le phasage des actions et les modalités d’évaluation. L’arrêté, quant à lui, va fixer le cadre général et se fonde sur l’arrêté du Gouvernement de la Communauté française de 2008, en y apportant des précisions et quelques adaptations. Pour le dépistage du cancer du sein, le texte précise, comme cela a été demandé : - le public cible, qui est lui-même basé sur les recommandations européennes et fédérales ; - le système des invitations et des réinvitations ; - le test de dépistage ; - les conditions pour être radiologue, deuxième et troisième lecture ; - la manière d’informer la personne qui a réalisé le test ; - les procédures d’octroi des agréments des unités de mammographie ; - les normes de contrôle utilisées pour s’assurer de la qualité des tests. J’ajoute à cela que l’on est aussi conscient que les recommandations européennes relatives au public cible des dépistages changent en fonction des études et des recherches menées. C’est pour cela qu’une modification de la tranche d’âge des publics n’est pas exclue à l’avenir. En plus de ces éléments, ce texte permet des avancées essentielles : - insérer durablement des programmes de dépistage au sein du corpus légal wallon ; - répondre aux nouvelles exigences qui viennent du RGPD - mettre en évidence l’importance des collaborations et la création des réseaux au profit de la prévention des cancers ; - insister sur les missions de communication dans le cadre des programmes. Ces dernières sont déléguées aux centres de charge des programmes et devront s’effectuer en collaboration avec les acteurs de terrain. Pour s’assurer de la qualité du texte, ce dernier a été soumis à la fois aux acteurs en charge des programmes actuels, mais aussi à d’autres experts comme l’Agence fédérale de contrôle nucléaire, des radiologues, des gynécologues, la Fondation Registre contre le cancer, des oncologues, et cetera. Puis, sur le financement de ces programmes, après 2024, si aucune solution de financement ne venait à se dégager, il est bien précisé que l’AViQ devra réaliser une économie en interne de son budget pour poursuivre le financement initié en 2024 et garantir la continuité de ces programmes. Cet arrêté permettra d’installer les programmes de dépistage au sein du paysage de la promotion de la santé et de la prévention. Les actions de promotion de la santé réalisées dans le cadre de la programmation ne seront pas détachées de ces programmes, puisque les centres auront une place au sein du comité de pilotage du plan WAPPS. Cela permettra de créer de vraies synergies entre les actions de promotion faites par les opérateurs et les actions de prévention réalisées par ces centres, dans un objectif d’efficience des programmes et, par conséquent, au bénéfice de la santé des citoyens et citoyennes. J’espère avoir répondu à toutes les questions que m’aurait posées Mme Ryckmans, mais qu’elle n’a pas posées, ainsi qu’aux vôtres. Je remercie le président d’avoir exceptionnellement accepté que je parle un peu plus longuement.


M. le Président. – La parole est à Mme Laffut.


Mme Laffut (MR). – Je vous remercie, Madame la Ministre, pour cette réponse bien complète. Vous l’avez rappelé : 30 à 50 % des cancers pourraient être évités grâce à la prévention. Je sais que vous êtes sensible à la chose. Je pense qu’il est super important d’évaluer – c’est ce qui est fait –, et surtout d’évoluer en fonction des données scientifiques qui nous sont transmises au fil des années. Vous avez parlé de l’importance de s’attaquer aux facteurs de risque, de l’alimentation, des addictions, de l’activité physique, et cetera. Vous avez également parlé de tout ce qui était mis en place au niveau de la programmation pour essayer de comprendre les causes et de s’y adapter au mieux. Je pense que la prévention, même si elle est déjà fort présente, doit encore et toujours être accentuée. Je vous remercie pour votre action dans ce domaine.

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