QUESTION ORALE DE MME LAFFUT À MME MORREALE, MINISTRE DE L’EMPLOI, DE LA FORMATION, DE LA SANTÉ, DE L’ACTION SOCIALE ET DE L’ÉCONOMIE SOCIALE, DE L’ÉGALITÉ DES CHANCES ET DES DROITS DES FEMMES, SUR « L’ÉVALUATION DU DISPOSITIF « PASSEPORT DRIVE » »
M. le Président. – L’ordre du jour appelle la question orale de Mme Laffut à Mme Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale et de l’Économie sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes, sur « l’évaluation du dispositif « Passeport Drive » ». La parole est à Mme Laffut pour poser sa question.
Mme Laffut (MR). – Madame la Ministre, en 2023, le Gouvernement wallon relançait le dispositif « Passeport Drive » permettant à certains demandeurs d’emploi de bénéficier d’un financement pour l’obtention du permis B auto ou AM cyclomoteur. Pour la partie théorique, 12 heures de cours sont inscrites au programme pour la partie théorique et, pour la partie pratique, ce sont respectivement 30 heures pour le permis B et 8 heures pour le permis AM, qui sont prévues en plus de la prise en charge des frais relatifs à ces deux examens. Dispose-t-on aujourd’hui d’une évaluation de ce dispositif ? L’une des critiques que l’on entend fréquemment porte sur l’insuffisance du nombre d’heures de cours dans le cadre du permis théorique au vu de la population à qui s’adresse cette mesure qui, pour la majorité, a parfois vécu un parcours scolaire plutôt chaotique. Partagez-vous cette analyse ?
M. le Président. – La parole est à Mme la Ministre Morreale.
Mme Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale et de l’Économie sociale, de l’Égalité des chances et des Droits des femmes. – Madame la Députée, une évaluation est en cours de réalisation par le FOREm en ce qui concerne l’édition 2020. Ce délai s’explique par le fait que chaque édition du dispositif « Passeport Drive » permet à un stagiaire, qui a reçu un passeport pendant l’année – je pense que l’on a commencé fin octobre –, de suivre la formation et de passer les examens jusque juin de l’année N+2. Le délai pour les auto-écoles était déjà extrêmement long. Il faut ensuite que le FOREm clôture administrativement les dossiers et prenne les contacts avec les bénéficiaires, les autoécoles et les centres d’examen. L’édition 2020 était plus large, que ce soit au niveau du public et du budget. Depuis, elle a été prolongée à la suite des fermetures engendrées par la crise sanitaire et les inondations. De plus, il y a eu des files d’attente importantes. Pour 2021, une évaluation pourra être menée dès la clôture, dans le courant du premier semestre 2024. L’attribution des passeports 2023 est toujours en cours. Cependant, des réunions de coordination sont régulièrement menées, tant avec les opérateurs de formation concernés par l’attribution des passeports Drive qu’avec les auto-écoles qui participent à ces mesures. Les constats posés dans votre question ont été relevés lors de ces réunions. Nous sommes arrivés au constat qu’il s’agit tout d’abord du mode d’apprentissage, surtout pour la partie théorique, qui n’est pas adapté au public ciblé. Il existe actuellement une seule auto-école sociale sur la Région wallonne qui dispense un apprentissage plus adapté à ce public. Plusieurs améliorations ont déjà été mises en place pour 5 PW – Session 2023-2024 – CRIC n° 47 – Emploi – Vendredi 17 novembre 2023 augmenter les chances de réussites des demandeurs d’emploi depuis 2021. Les cours de conduites, théoriques et pratiques, et les préparations aux examens restent une prérogative exclusive des auto-écoles. Cependant, il existe déjà, dans le panorama des formations des opérateurs partenaires du dispositif, plusieurs actions de soutien, en amont, à la préparation au permis de conduire. Nous sommes partis du constat que nous devions utiliser l’offre existante en complément de la mesure « Passeport Drive » afin de répondre au besoin du public visé. De manière plus explicite, plus de 50 % des demandeurs d’emploi n’ont pas de permis de conduire, ce qui représente un gros handicap. Hier, j’ai rencontré l’Union wallonne des entreprises, expliquant sa difficulté de recruter du personnel et disant : « Parfois, on ne cherche pas de gens qualifiés, mais un moyen de locomotion ». C’est cela la réalité. Jusqu’à 56 % des demandeurs d’emploi n’ont pas leur permis, il y a des taux d’échec extrêmement importants, 10 % des personnes sont illettrées ou analphabètes, ne comprennent pas ou ne maîtrisent pas suffisamment le français, et beaucoup de gens n’ont pas leur CESS. Nous voyons bien dans notre entourage que, quand il faut passer le permis théorique, même si ce sont des étudiants de rhéto généralistes ou même parfois de jeunes adultes à l’université, ils se plantent. C’est devenu extrêmement complexe et c’est profondément discriminant. Plus on complexifie la partie théorique, plus on conduit à des exclusions et à un empêchement, un frein au développement, à pouvoir trouver un emploi. Cela m’inquiète beaucoup, tout comme le coût des autoécoles. Cela coûte 2 000 euros. Objectivement, il y a plein de gens qui témoignent, qui ne savent pas se les payer. On peut ici, dans le cadre des pouvoirs publics, le faire, mais on ne résout qu’une partie du problème puisqu’ils ne sont pas en mesure de répondre à des questions qui sont extrêmement complexes. Je m’en suis déjà ouverte à ma collègue De Bue qui screene et qui est OK de travailler comme je l’ai fait, par exemple, dans le cadre de la réforme du FOREm. On s’est dit que l’on va simplifier les choses. Si l’on part de notre point de vue, les choses peuvent paraître simples, mais il faut toujours se mettre à la place de la personne la plus fragile. Combien en sort-on du dispositif quand on fait des pratiques qui sont plus exigeantes ? L’important, c’est que les gens conduisent en sécurité, ne mettent pas les autres en danger et ne se mettent pas en danger. C’est la priorité. La ministre De Bue a déjà fait des actions et elle travaille sur le sujet. Je ne sais pas si l’on aura encore l’occasion de pouvoir approfondir sous cette législature, mais c’est un vrai enjeu de société et d’accès à l’emploi.
M. le Président. – La parole est à Mme Laffut.
Mme Laffut (MR). – Je vous remercie pour ces éléments de réponse. Je vois que vous partagez le constat : la mobilité est un vrai handicap quand on doit trouver un emploi. J’étais déjà intervenue auprès de votre collègue par rapport au permis théorique, parce que l’on se rend compte que c’est une problématique, parfois pour les personnes qui ont eu un parcours difficile, mais c’est déjà, comme vous l’avez dit, compliqué pour des personnes qui n’ont pas un parcours difficile. C’est clair que cette simplification du permis théorique est souhaitée par tout le monde. Je n’ai aucun souci à ce que l’on complexifie l’examen pratique à titre personnel, mais c’est vrai que cette partie théorique en freine plus d’un et et l’on se demande un petit peu à qui cela sert finalement. Je pense qu’il y a des améliorations à faire de ce côté. Je serai quand même intéressée d’avoir l’évaluation du dispositif de manière générale, quand elles seront divulguées et clôturées. J’entends malgré tout qu’il y a déjà des améliorations qui sont mises en place et je m’en réjouis.
(Réaction de Mme la Ministre Morreale)
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